dimanche, juillet 09, 2006

L’Habitat comme souvenir ( 2 /l’adolescence)

Début de cette série de texte là.
Excusez la précocité de l’Ogre
Pour des raisons de tailles de post je fais commencer l’adolescence à 10 ans.

L’été de mes dix ans je pars avec ma mère à Chicago dans l’illinois.
Je me souviens de ma première nuit américaine. Nous avons dormi dans un hôtel du dowtown qui donnait sur le « loop » (le quartier des affaires). J’ai le souvenir d’un hôtel assez miteux et ça me surprends pas mal car normalement payé par le taf de ma mère. A cause du décalage horaire et de l’excitation je n’ai pas beaucoup dormi. Je suis scotché par la nuit orange. Arrivant de Roumanie ou les gens volaient les ampoules pour les revendre à d’autres qui de tout façon n’avait pas l’électricité, ces lumières partout et à toutes heures m’ont bouleversés. C
’est ce soir là que j’ai compris que j’étais dans un pays ou les choses étaient grandes ou n’était pas du tout. Les matelas ne sont pas géniaux. J’étais perplexe, c’ était la première fois que je regardais ma mère dormir, un peu comme un marin qui regarde un phare éteint. Je me suis rendu compte qu’une mère n’était pas toujours debout et active.
Je me souviens du bruit métallique du « El », le metro aérien, qui passait sous les fenêtres ou pas loin comme des boites de conserves qui se traînent.

L’appartement de Chicago était bourgeois.
Une bâtisse en U construite au début des années 1900 comme on en voit beaucoup dans les films américain. Le centre du U était dallé avec des parterres de buissons. Dans le hall de l’immeuble un portier-concierge noir toujours mort de rire… nous étions en plein cliché. Après avoir blagué un moment et récupérer le courrier nous partions vers la gauche prendre un ascenseur jusqu’au troisième.
L’appartement donnait sur West Surf street qui était une rue calme qui reliait le bruyant boulvard shéridan ( qui longait de pas trop loin le lac Michigan) et la fourche brouillonne de Clark et Brodway Street.
Cette Surf Street était arborée et nous n’étions pas loin de l’immense Parc Lincoln qui finissait dans le lac.
L’appartement, comparé a celui de Bucarset, est petit.
Plus tard je me rendrai compte qu’il avait une taille tout a fait normale et même au dessus de la moyenne. L’ entrée était minuscule bordée d’un coté d’un « placard miroirs » et de l’autre par la porte de la chambre de ma mère, celle de la salle de bain et enfin sur la pièce principale. A la gauche de cette grande pièce au parquet sombre se trouvait la cuisine typiquement américaine ( petite mais avec un frigo énorme, ouverte sur le reste de l’appartement, le téléphone accroché au mur et un broyeur dans l’évier ( ouah tout ça en 1985).
Le déménagement arrivant par bateau jusqu'à la côte est puis par la route jusqu'à la région des grands lacs nous avons vécus de longues semaines dans un appartement vide de tout sauf de deux valises et d’une multitude de nouveaux appareils électriques achetés sur place à cause de la différence de voltage.
L’entrée, la chambre de ma mère et le grand placard jouxtant ma chambre étaient recouverts d’un grosse moquette beige.
C’étais la première fois que je voyais un truc comme ça. J’ai vraiment l’impression d’être bête en écrivant ça mais je crois que, encore au milieu des années quatre-vingt, on pouvait être totalement dépaysés en arrivant aux Etats-Unis et en tombant sur des choses du quotidien qui n’avaient pas encore traversés l’Atlantique alors que de nos jours, que se soit pour les fringues, pour les idées ou pour les disques, tout arrive presque simultanément.
La première fenêtre de cette salle s’ouvrait à l’intérieur du U comme celle de la minuscule chambre de ma mère tandis que l’autre (ainsi que les trois fenêtres de ma chambre ) donnaient sur Surf Street .

J’ai adoré cette chambre. Je me souviens que c’était l’endroit idéal pour observer les écureuils qui pullulent en Amérique du nord et qui n’ont pas peur de villes comme Chicago, New-York ou Boston. C’est là que j’ai aussi décidé d’arrêter de jouer. Un jour je me suis levé et j’ai jeté les légo, les poupées et les he-man dans un sac que j’ai mis à la poubelle. Ma mère l’as récupéré et garder quelques temps puis, voyant que ma décision était irrévocable avait déposer le sac dans la rue pour que d’autres se servent.
C’est dans cette chambre que je suis devenue un grand !

C’est là que j’ai commencé a passer mon temps à écouter la radio. Des heures passer à écouter des stations aux initiales délirantes comme savent si bien le faire les amérloques.

Un soir, la dernière année de notre vie américaine, un animateur radio commentait le nouvel album de Prince, et constatant que le chanteur posait nu sur la pochette il a dit : « hey watchout ! don’t buy Prince’s new album because everyone will think you’re gay ! ». Je me suis donc bien juré de ne jamais acheter Lovesexy de ma vie !
…. J’ai eu, des années plus tard, d’abord le vinyle ( jamais de K7 la photo est trop petite !) puis le cd de cet album, que j’ai ensuite prêté a un connard qui est parti sans laisser d’adresse

Il y avait aussi un vaste placard qui faisant la longueur de la chambre et la moitié de sa largeur. Cet endroit est devenu ma chambre quand mon cousin, âgé d’une vingtaine d’année, est venu habiter avec nous pendant ces études.
Je suis assez surpris d’avoir adoré ça, moi qui suis maintenant complètement claustrophobe et qui est content de trouver sudokus et mots croisés au chiotte pour éviter de réaliser que, chez moi, c’est la seule pièce sans fenêtre.
J’avais donc une chambre entièrement fermée qui amplifiait mes premières émois de lecteur de fantastique. Je crois que c’est dans cette caverne que j’ai lu (ou tenter de lire) mes premiers lovecraft, poe et toute la collection des « Alfred Hitchcock presents…. ».
En plus je crois que le jeune adolescent aime baigner dans son jus et ses odeurs et que par conséquence, cette chambre sans fenêtre, était idéale.
Dans cette appartement j’ai aussi ressentis un léger tremblement de terre qui a fait tomber, les un après les autres, quatre tableaux dans le salon.

A Oslo ( Norvège) nous avons habités deux appartements différent.
Le premier se trouvait dans une rue en pente entre le Palais Royal et le port. Le bâtiment était une sorte d’immeuble haussmannien sans éclat ; Nous habitions au dernier étage dans un appartement blanc aux hauts plafonds. Il était divisé en deux partie distincte reliées par un couloir étroit.


Une fois dans l’entrée nous pouvions allé en face dans un salon ou , par une porte sur le coté dans une autre pièce qui communiquait avec le premier salon par une grande ouverture.
De l’entrée on pouvait aussi accéder à un drôle de chiotte à double porte puisqu’il communiquait avec ma chambre. Ma chambre et la grande pièce donnaient sur le couloir qui aboutissait sur l’autre partie de l’appart, une jolie cuisine, une chambre de bonne et un antique escalier de service. Ma mère dormait dans le salon près de l’entrée qu’elle transformait en chambre le soir car la pièce tout au bout de la cuisine était minuscule et inchauffable.
C’est dans cet appartement que je me suis enfoncé dans le mal être adolescent. Comment peut-on se gâcher la vie à cet age là avec des problèmes de cœur, de sexualité d’hormones et de place à tenir dans la société ?
Ma fenêtre donnait sur une cour peu lumineuse dans un pays ou, au plus fort de l’hivers, le soleil se lève à 10h30 pour se coucher à trois heures de l’après-midi. Du coté rue on voyait l’immeuble d’en face. Un immeuble jumeau ou ma vue plongeait souvent sur un cabinet de dentiste et sur une grande salle ou avait lieu des cours de ju jitsu. Quand on étirait le cou par la fenêtre on pouvait apercevoir Drammensvein, la grande artère qui traverse la ville d’est en ouest et les arbres du parc du château royal.
C’est dans les toilettes loufoques de cet appartement que ma mère a retrouver mes premiers mégots. J’ai donc découvert l’extrême capacité de flottaison des mégots et c’est là aussi que j’ai appris a ne pas faire confiance aux chasses d’eau.
Un matin de mars, alors que j’étais en caleçon dans le salon j’ai appris la mort de Gainsbourg en écoutant les titres du journal du matin de Radio France Internationale.
C’est aussi le seul appartement, après avoir habiter en Roumanie et à Chicago, ou nous nous sommes fait cambriolés. Oslo, comme OgreVille, est un endroit ou j’ai passé mon temps à me faire piquer mes vélos.


Tout ceux qui ont déjà été cambriolé savent les mois de mal-être et de sentiments d’insécurité qui suivent. J’ai détesté cet appartement à partir de ce moment là, c’était la première fois que je voyais ma mère malheureuse à la suite de pertes matérielles, on lui avait voler des bijoux sans valeurs mais qui appartenait à sa mère.
Nous avions de vieux voisins cons qui avait l’habitude de gueuler a chaque petit bruit dans l’immeuble mais qui, bien sur, cet fois n’avaient rien entendu. Ils ont aussi fait comprendre à ma mère que c’était un peu de notre faute car il avait fallu attendre notre arrivé dans l’immeuble pour qu’un cambriolage se produise…. Et par la même provoque un séisme dans les statistiques extrêmement basse de l’insécurité de leurs royaume de merde !
C’est ce couple de vieux qui, bien avant l’homo phobie, m’as fait sentir victime d’un racisme light, d’un petit racisme entre blanc : Nous étions Français donc un peuple de sud.
Je me souviens du pincement de lèvres du monsieur quand on leur a dit ( qu’en plus) nous étions originaire du sud de la France. La méditerranée ils ne connaissaient pas puisque la civilisation s’arrêtait d’un coté à Bruxelles et de l’autre en Suisse. Il y avait quand même des terres magnifiques à l’est mais, pour quelques mois encore, elles s’appelaient « le bloc communiste » alors mes voisins avait un peu peur de s’y faire égorgé en allant y faire un tour. Nous étions donc sale et mal élevé.
Ils ont aussi vite réalisé que ma mère travaillait et m’élevait seule alors ils nous regardaient avec une grande condescendance.
Ce n’était pas un racisme violent, un racisme de pauvre mais il a duré trois ans.

Ce couple était aussi responsable de la parabole de l’immeuble et, ce pays étant anglo et germanophile, cette dernière était toujours orienter pour capter les chaînes de ces langues là. En deux ans nous n’avons pas eu le droit a une heure de TV5 Europe.
Un jour une nouvelle parabole qui fut installée et nous pûmes accéder aux chaînes francophones pendant qu’ils mataient les leurs.

Comme le séjour en Norvège fut rallongé d’un an nous emménageâmes dans un quartier résidentiel pas trop loin des écoles française et anglaises. Les grandes et longues vitres donnaient sur le parking de l’immeuble et sur les arbres qui servait de clôture à la résidence. J’ai eu l’impression de revivre un peu.
Un peu de lumière dans un pays si sombre.
L’appartement était moins grand que le premier mais beaucoup plus fonctionnel. La propriétaire avait laissée un tas de meubles si moches qu’il régnait dans les pièces une atmosphère surréaliste.
Je garde de très mauvais souvenirs de ce pays. C'est sans doute à cause de l'age que j'avais lorque nous avons habités là-bas mais aussi à cause des hivers et des rapports humains dans ce pays que j'ai eu du mal à comprendre.

Après mon bac français je suis retourné en France.
J’ai passé ma terminale à Carcassonne chez une de mes tantes car ma mère devait passer un an à Paris et que je n’avais pas vraiment envi d’être parachuté dans une grande ville inconnue pour finalement y planter mon bac.
Carcassonne avait la bonne idée de se trouver à une quarantaine kilomètres au nord ouest du village familiale et d’être habité par quelques amis. Sinon…. Carcassonne est terriblement triste et plate.
L’immeuble se trouvait au Viguier, quartier sud et populaire qui longe la route de Limoux. C’était la fin de la ville car derrière le bâtiment il n’y avait plus que des champs jaunis et la rocade.
L’appart était petit mais très bien aménagé. Ma tante ayant un boulot aux horaires étranges et beaucoup d’activités autres je passais de longs moments seul avec Carotte un chat de dix-neuf ans au caractère infecte.
La salle de bain était la fierté de ma tante.
Elle avait bossée dur pour y mettre miroirs et marbres. On y entrait en passant derrière un gros rideau de velours noir cousus de fil doré !
Je n’ai pas grand souvenir dans cet appartement car des que je le pouvais ( le mardi soir et le samedi matin) je partais dans les collines en scooter pour rejoindre le village, sa rivière et ses pinèdes car c’est là que nous étions les rois.
Cette année de terminale est sans doute une des plus belle de ma vie.

2 commentaires:

Anonyme a dit…

merci de nous faire voyager !

Gros bisous !

Cess.

Anonyme a dit…

j'adore! j'imagine tout très bien. Aussi l'année de terminale...avec tes amis...arlek1