mercredi, novembre 01, 2006

L’habitat comme souvenir ( 5/ l'impasse)

Début de cette chronique:
L’année d’après j’ai quitté la cité-U pour m’installer dans un studio en rez de chaussé d’un minuscule immeuble dans l’impasse Paul Verlaine.
Cette impasse donnait sur une grande artère de la ville, la Voie Domitienne. La maison ou se trouvait le studio était la dernière de l’impasse qui se finissait sur le mur d’un jardin que l’on pouvait longer pour aboutir sur la rue du Triolet.

Mon impasse était un savant mélange de goudron et de poussières . Il n’y avait de maisons que d’un seul coté puisque l’autre était occupé par l’arrière d’un grand immeuble et de ses garages.
La maison ou se trouvait le studio était une bâtisse des années quarante ( ou cinquante) sans aucun charme. Je n’arrive pas a savoir si elle a été construite comme une vrai grande maison et, plus tard, divisée en quatre appartements ou si , des l’origine elle avait été aménagé comme un petit immeuble.

Il y avait quatre appartements et, en un an, je n’ai jamais croisé de voisins. Il y avait bien une personne qui habité en rez de chaussé comme moi mais je n’ai jamais vu les volets ouverts.
Comme j’ai une imagination galopante et que j’avais un penchant marqué pour le cannabis, ce « voisin-taupe » a occupé ma tête une bonne partie de mes soirées d’hiver.
Il y avait une grande fenêtre pour éclairer la pièce principale. Elle ouvrait sur la façade principale de l’immeuble et donnait sur la poussière de l’impasse et, lorsque le soleil brillait j’étais gêné par l’éclats des toits et des capots de voitures garé a quelques mètres de chez moi. Cette fenêtre me permettait de surveiller les allers et venues des habitants de l’immeuble…mais bon…je ne voyais jamais personne.

Cette grande pièce, en forme de L me servait de chambre, de salon et de cuisine. Elle ne me servait pas de bureau car c’est l’année ou j’ai strictement rien foutu. Le coin cuisine ( peint d’un jaune pisseux) était séparé du reste par un muret d’un mètre qui aurait pu servir de bar si la planche le recouvrant avait été plus large. Ce muret me servait à poser ( exposer ?) les nombreuses boites contenants mes divers thés.
Face à l’entrée, de l’autre coté de la pièce en forme de L, se trouvait la porte qui donnait sur la salle de bain et les toilettes. Ces deux pièces minuscules étaient ventilées et éclairées par deux antiques fenêtres-soupirails. C’était l’endroit magique de l’appartement…Ces deux ouvertures donnaient véritablement sur l’intérieur du dôme branchu et feuillu d’un figuier poisseux. Au printemps et en été l’odeur de l’arbre se répandait dans le studio. Quand je prenais un bain dans la baignoire sabot je pouvais aussi jeter un œil sur les vies improbables qui se développent au cœur d’un arbre.

Lorsqu’il y avait du vent mes journées étaient rythmées par le bruit des branches raclant les murs et fouettant les vitres épaisses de mes deux soupiraux.
Le studio était recouvert d’ un carrelage blanc moucheté de noir et les murs ainsi que le plafond étaient en sorte de béton…….. C’était un écho perpétuel.

C’est dans cet endroit que j’ai ramené mon premier « charmant inconnu »….ô méchante erreur de jeunesse ! Ce gars là n’avait manifestement pas les mêmes intentions que moi et j’ai du me battre pour le foutre dehors ( sans qu’il emporte ma thune et mes disques lasers). Pendant les deux semaines qui ont suivies il n’as pas arrêter de roder aux abords et dans l’impasse…. A chaque fois que je sortais ou que je rentrais chez moi je croisais son sourire moqueur.

L’impasse Paul Verlaine………. Je n’habitais plus dans l’enceinte de la fac, j’habitait réellement dans un non-quartier loin de l’atmosphère étudiante.
D’ailleurs c’est l’année ou je n’ai plus fréquenté mes amis étudiants. Je ne supportait plus ce monde, j’étais à la fac aussi malheureux qu’entre les quatre murs du lycée… le problème c’est que mon groupe d’ami sur Montpellier était plus neuf, moins enclin a supporter mes frasques et mes coups de blues que ma bande de potes des montagnes. Je me souviens aussi d’avoir aimé une femme dans ce studio……….c’est assez rare pour le souligner.

Je fais souvent ce rêve étrange et pénétrant
D’une femme inconnue, et que j’aime, et qui m’aime,
Et qui n’est, chaque fois, ni tout à fait la même
Ni tout à fait une autre, et m’aime et me comprend.
Car elle me comprend, et mon cœur, transparent
Pour elle seule, hélas ! cesse d’être un problème
Pour elle seule, et les moiteurs de mon front blême,
Elle seule les sait rafraîchir, en pleurant.
Est-elle brune, blonde ou rousse ? — Je l’ignore.
Son nom ? Je me souviens qu’il est doux et sonore
Comme ceux des aimés que la Vie exila.
Son regard est pareil au regard des statues,
Et, pour sa voix, lointaine, et calme, et grave, elle a
L’inflexion des voix chères qui se sont tues.

1 commentaire:

Brigetoun a dit…

combien d'entre nous ce poème a-t-il bercé ?